Sophie Dherbecourt[FRA]

  • Art & Peinture

Chronique

Le 18.10.2019 par JULIETTE MANTELET

À l’occasion du dossier du mois sur L’ère du crew, reparlons de l’oeuvre de Sophie Dherbecourt, peintre française qui a choisi de mettre en avant l’humain. Par son trait cubiste, elle évoque notre jeune génération à la manière d’un mythe antique. Sophie peint des hommes et des femmes par deux, par trois, par dizaine, qui cohabitent dans une sérénité digne de l’Olympe. C’est la bande (nue) organisée, à son état le plus pur.

Un article de Juliette Mantelet du 18 octobre 2019


 

Des hommes, des femmes. Des corps nus déconstruits à la manière d’une toile cubiste. Des corps égaux dans une nudité sincère et poétique. En arrière-plan des arches et des amphores évoquent l’Antiquité. Mais des smartphones et des Nike se mêlent aussi à la danse. C’est l’Olympe 2.0 de Sophie Dherbecourt, notre peintre du jour. Une sorte de paradis mythique et fabuleux où homme et femme seraient égaux, enfin, au corps à corps.

SOPHIE & L’OLYMPE

Les personnages de Sophie ont le regard lointain. Ils sont doux, calmes, mélancoliques. Par ses portraits qui mêlent Antiquité et modernité, Sophie évoque notre génération à la manière d’un mythe et surtout la mélancolie contemporaine qui la caractérise. Une génération qui ne sait où se situer. Entre deux eaux, entre deux feux. Celui du nouveau monde et celui de l’ancien temps. Celle qui se demande comment réinventer et reconstruire un système, une société et même une planète. Cette génération qui ne peut plus fermer les yeux sur les problématiques urgentes de son temps. Ne peut plus repousser. Torturée mais pleine d’espoir, unie dans une nouvelle forme de sororité universelle magnifique. Sophie peint des hommes et des femmes, par deux ou par trois, qui cohabitent dans une sérénité digne de l’Olympe.

Sophie est tombée amoureuse du corps nu dans un cours de modèle vivant. Elle aime la fragilité et l’honnêteté de ce corps qui n’a plus rien à cacher. Ses inspirations ? Les statues antiques, Tamara de Lempicka, Cézanne et les cubistes. Ces artistes qui ont déconstruit le corps humain. Sophie voit le corps comme une architecture, entre cylindres et formes géométriques. Elle peint l’autre. Fait poser des modèles pour capturer leur essence puis s’amuse à brouiller les ressemblances. La déconstruction lui permet d’aller plus loin. Ailleurs que dans la rondeur du body positivsm. Elle s’inspire de sa propre morphologie, longiligne, anguleuse. Sophie déconstruit et s’attaque avec force aux clichés sur le masculin et le féminin. Dans son monde, qu’on soit homme ou femme, les corps se ressemblent. Dénudés et composés de simples formes géométriques. L’homme est peint avec la même sensualité poétique que la femme. Sans « virilité abusive », pour reprendre les mots d’Eddy de Pretto. C’est aussi par provoc’ que Sophie s’est spécialisée dans le nu. Comme un ras-le-bol de la censure exercée au quotidien sur le corps des filles, toujours sacralisé et sexualisé. En 2019, une photo d’une femme qui allaite sur Instagram est toujours immédiatement supprimée, quand nos feeds sont pourtant saturés de mannequins masculins torse-nu. Sophie prône une égalité corporelle originelle, à la manière d’Adam et Eve. Une même liberté de se dénuder ou de se couvrir. Dans l’Olympe de Sophie comme dans La Baie de Clara Luciani : « Les femmes sont nues, les hommes aussi. ». Et tout va bien.

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