Simon Nicoloso[FRA]

  • Photographie & Cinéma

Chronique

Le 18.02.2020 par Juliette Mantelet

Comme Charles Thiefaine ou Sidney Léa Le Bour, Simon Nicoloso a dérivé de l’architecture vers la photo. Il a fait ses études d’archi à Grenoble, mais s’est vraiment mis à la photo lors de son année d’Erasmus à Barcelone. D’abord en noir et blanc. Dès ses débuts, l’ailleurs et le voyage ont orienté sa pratique. Comme Aitor Lorenzo, Simon a la bougeotte. Le Québec, les paysages ultra photogéniques de l’Ouest américain où il ne cesse de retourner, la France. Il vient de sortir un livre, « West Land », fruit de ses voyages aux USA. L’été dernier justement, il est retourné seul aux États-Unis, dans des endroits moins touristiques. Il s’est levé à 5h du matin tous les jours pour ne pas louper la « belle lumière » et a enfilé les kilomètres. De Miami à Atlanta et Memphis. Puis tout droit, jusqu’au Nouveau-Mexique et enfin cap sur le Texas. 8 000 km en deux semaines exactement.

DOUBLES VIES

Simon est toujours architecte. Il a même monté son agence, Format, il y a un an. Qui lui prend pas mal de temps. La photo reste un loisir, qui ne lui rapporte rien. Simon précise que même si on a du succès sur Instagram, « ça ne veut pas dire qu’on vend beaucoup de photos ! » Instagram, une appli qui « reste un peu fast food » selon lui. Son objectif, c’est d’arriver à équilibrer les deux. Pour trouver l’inspiration, Simon a toujours besoin de partir. C’est simple, il voyage depuis qu’il est petit. « C’est toujours plus facile de voir des choses à prendre en photo quand tu es dans un endroit que tu ne connais pas », explique-t-il. Il habite Paris depuis un an, mais n’a pas pris une seule photo depuis son arrivé. Ce qui le branche, ce n’est pas son quotidien mais l’ailleurs. La photographie de Simon est ainsi intimement liée à cette esthétique du road trip, née sous les objectifs de Stephen Shore ou de William Eggleston. Même lorsque Simon immortalise les bleds paumés du nord de la France, ce qu’il capture c’est ce qu’on peut voir depuis sa voiture. Ce qui défile devant les yeux au cours du voyage. Et qui interpelle. « Ce n’est pas vraiment de la photo de voyage. C’est plus que quand je voyage, je regarde plus ce qu’il y a autour de moi ».

LE COMPAS DANS L’ŒIL

Sa formation d’architecte influence forcément ses clichés. Comme on dit, il a le compas dans l’œil. Il compose avec précision et traque les angles et les lignes. « Des choses que je ne regarderais pas forcément si je n’étais pas architecte ». Ses images sont moins libres que celles de Shore ou Eggleston. Simon cadre systématiquement droit. Aucune ligne ne penche. Il photographie des éléments non-architecturaux de manière composée, géométrique. Mais pour autant a du mal à photographier en pleine ville, car il cherche toujours la ligne de fuite, l’horizon. Celle qui lui manquait dans les Hautes-Alpes où il a grandi, où un autre sommet venait toujours interrompre son regard.

Plutôt que de poursuivre une quête vaine du cliché parfait, Simon réfléchit à l’atmosphère de ses séries dans leur ensemble. Pour livrer une vraie histoire. Aux États-Unis l’été, comme dans le nord de la France en plein hiver, Simon raconte ces lieux périurbains délaissés, abandonnés, où « tu sens qu’il peut se passer quelque chose ». À une autre saison, peut-être. Ou il y a trente ans. Ces espaces qui furent touristiques mais ne le sont plus vraiment. Comme Tucumcari, au Nouveau-Mexique. Où la route 66 passait autrefois. Une ville fourmillante de motels maintenant déserts. Il conte les territoires immenses mais vides de l’Amérique, « ce grand terrain de jeu ». Simon rêve justement d’établir une cartographie complète des États-Unis. En attendant, découvrez-son premier livre et contemplez ses images qu’il nous a envoyées.

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