Emma Bergmann[FRA]

  • Musique

Interview

Le 20.04.2023 par Julie Le Minor

Dans le nid parisien d’Emma Bergmann

On  a pris de la hauteur avec l’artiste parisienne à l’aura glamour et singulière qui éclaire la scène musicale française avec son double artistique mi-diva mi-vamp dont les références plurielles s’inspirent du couple culte formé par Ingrid et Ingmar Bergman aux tubes de Nostalgie, de Kate Bush à Madonna.

Portrait d'Emma Bergmann en rose et bleu assise devant son piano blanc

C’est dans son refuge du 19e arrondissement qu’Emma nous reçoit. Un appartement en bois sous les toits de Paris qu’elle imagine comme un bateau en dehors de la ville. Dans ce lieu singulier et arty, l’artiste se ressource et compose quand elle ne s’est pas évadée sur une île avec son mec, en Corse notamment. Artiste protéiforme, Emma a commencé sa carrière par la comédie avant de tomber un peu par hasard dans la musique. Aujourd’hui, elle a créé son personnage de scène – Emma Bergmann – comme un alter ego artistique et fictif dont le nom est emprunté à la mythologie du 7e art et au couple légendaire formé par Ingrid et Ingmar. De cette diva qu’elle a imaginée comme « une icône glamour et casse gueule », loin des clichés lisses de la pop star, Emma partage son goût pour la singularité, l’exubérance et l’irrévérence. Attention, ça tourne !

Ce jour-là, la jeune femme nous accuEiLle dans une tenue rose fluo à l’allure rétro ponctuée de bottes bleues ÉlEctriques, assorties à sa guitare.

Ce jour-là, la jeune femme nous accueille dans une tenue rose fluo à l’allure rétro ponctuée de bottes bleues électriques, assorties à sa guitare. Installée confortablement dans son fauteuil, elle nous raconte son parcours atypique entre Paris, Marseille, l’île d’Yeu et la Corse. Fille d’un père, metteur en scène, et d’une mère comédienne, Emma quitte la grisaille parisienne à l’âge de cinq ans pour s’évader sous le ciel azur de la cité phocéenne. La vie est douce à Marseille, ses parents travaillent au théâtre de la Criée et Emma baigne dans l’art, la musique et la culture. De retour à Paris, la jeune fille s’attaque à l’adolescence, et comme souvent, ce n’est pas une mince affaire. Elle ne le sait pas encore, mais elle souffre de dyslexie et de troubles de l’attention qui lui font vivre un cauchemar à l’école. Incrédule face à un système qui ne semble ni la voir, ni l’entendre, ni la comprendre, Emma décide finalement d’arrêter ses études à quinze ans, soutenue par sa mère, qu’elle parvient à convaincre après une longue plaidoirie où la jeune actrice démontre une fois de plus tout son art.

Vue sur le bureau d'Emma Bergmann où est posé une lampe coloré ainsi qu'un tableau et un bloc-note. Une bibliothèque en arrière plan

« Si on me demande demain d’être Ministre de l’éducation, j’accepte », poursuit-elle, en riant. « On n’est pas assez considéré comme des individus sensibles et doués de raison avant l’âge adulte et c’est bien dommage ». Désormais, Emma doit trouver seule sa voie. Elle commence par la comédie. « J’étais un peu perdue, je ne savais pas ce que je voulais faire. Le soir, j’allais  chez Disc’ King à Montparnasse, j’achetais 3 films et je m’endormais en fumant des joints ». Après quelques passages fugaces à la télévision – on n’en saura pas plus – la jeune fille commence à chanter et à composer « un peu par hasard ». « D’un seul coup, je me suis mise à écrire mes chansons, en anglais d’abord ». Autodidacte, Emma a appris la langue de Shakespeare devant les films. Le cinéma est comme une seconde famille qui l’accepte et avec laquelle elle se sent bien. Au fil des ans, le français la rattrape et pendant le confinement, Emma commence à écrire des chansons dans sa langue maternelle, un moment charnière pour elle. 

En vrac, ça donne : Kate Bush, Madonna, Frank Ocean, Lykke Li, Portishead, Diana Ross et Mylène Farmer.

Mélancolique, mais pas nostalgique, le parcours musical d’Emma est comme elle. Pluriel, joyeux et débridé. Un mélange de variété, pop, R’n’B et électro qui façonne l’identité de son premier groupe, Palmyre, un duo électro-disco, qu’elle formait avec Vincent Perrin et qui guide encore aujourd’hui sa carrière solo et sa voix cristalline. La jeune artiste se souvient des tubes de son enfance qu’elle écoutait en boucle en voiture avec ses parents sur Nostalgie. Michel Berger, « un génie », puis Bashung, bien-sûr. Puis, ce sont les années rock avec le Mouv. Sans oublier son premier iPod qui inaugure sa période R&B et Hip hop. En vrac, ça donne : Kate Bush, Madonna, Frank Ocean, Lykke Li, Portishead, Diana Ross et Mylène Farmer. On peut ajouter David Bowie certainement, comme en atteste ce livre mis en évidence sur son étagère. Beaucoup de figures féminines donc, qui l’inspirent encore aujourd’hui. 

Cadre de Dolly Parton à côté d'un vinyle d'Omar JR "Aloha 66" sur une deserte vintage orange

« La musique n’est pas un univers facile quand on est une fille. J’ai dû faire face à beaucoup de désillusions et je me suis laissé avoir plus d’une fois. Dans ce milieu, c’est important la solidarité féminine : cela permet d’éviter les écueils et les personnes toxiques. Aujourd’hui, j’admire beaucoup la nouvelle scène féminine parisienne, des artistes comme Anna Majidson, Prudence (ancien membre de The Do), ou encore Kalika avec qui je suis devenue très proche. On est comme une nouvelle famille ». Une vraie sororité. Derrière ses airs de diva exubérante et vengeresse et son look ultra-sharp aux allures de Vamp, il émane d’Emma une sincérité déconcertante, une certaine vulnérabilité aussi qu’il l’intéresse de plus en plus : « C’est intéressant de se savoir fragile parfois. Je suis une grande mélancolique. C’est pour ça que je porte des vêtements toujours très colorés et extravagants. Ce sont eux qui me donnent le sourire et qui me reboostent quand il le faut. Mes fringues sont comme une armure, elles me donnent de la force ».

Anti-héroïne, Emma incarne la diva des temps modernes par excellence à la croisée d’une actrice de cinéma des années 70 et d’un personnage haut en couleur de Virginie Despentes. Une artiste aux allures punk et à l’aura joyeuse qui vit de son art en se moquant des conventions et des qu’en-dira-t-on. Aujourd’hui, Emma vient de quitter son label et s’apprête à suivre sa voie rêvée en dehors de la rumeur de la ville. Si elle a choisi l’île d’Yeu et l’île de beauté comme nouveaux refuges pour écrire et composer, ce n’est certainement pas un hasard.

Portrait d'Emma Bergmann en rose et bleu assise devant son piano blancVue du nid parisien d'Emma Bergmann avec un piano blanc, un clavier, un cadre coloré et un walkman noir et rouge

Focus sur un vinyle King's Mouth posé sur la bibliothèque d'Emma Bergmann entre des livres et des poupées russesPortrait d'Emma Bergmann en rose et bleu assise sur un fauteuil noir et blanc et accoudée à une échelle en boisPile de livres dont un dédié à David Bowie chez Emma Bergmann

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