Caroline Morin[FRA]

  • Illustration

Chronique

Le 15.07.2019 par JULIETTE MANTELET

Caroline Morin dessine des femmes sans visage, dans un univers habillé de rose et de beige, couleurs de la peau. Caractérisé par une extrême douceur minimaliste. Son travail est charnel, réconfortant, entre abstraction et féminisme.

LE FOND, LA FORME, LES FEMMES…

Caroline possède différentes manières de représenter les femmes, prouvant à nouveau leur diversité. Parfois, ses traits se font particulièrement fins et précis, comme lorsqu’elle dessine cette femme à l’oiseau. Finesse extrême de sa chevelure blanche, de son petit nez retroussé, de ses lèvres entrouvertes, de ses doigts repliés. Dans d’autres scènes, ses traits sont plus schématiques, plus abstraits et géométriques : un trait horizontal fait figure de nez, les bras sont résumés à deux lignes verticales, les cheveux composés d’un seul trait blanc de contour. Ses figures graphiques rappellent, en couleurs et en rose, ceux d’une autre bretonne, Johanna Olk. Les deux femmes simplifient les visages, naviguant entre abstraction et figuration. Caroline dessine principalement des femmes sans visage, pour atteindre une dimension plus universelle de la féminité et permettre à ses spectatrices de se retrouver plus facilement dans un geste, un mouvement. Quand on lui demande d’expliquer ce choix, elle cite cette phrase de Picasso : « Faut-il peindre ce qu’il y a sur un visage ? Ce qu’il y a dans un visage ? Ou ce qui se cache derrière un visage ? »… Et précise qu’elle préfère suggérer que représenter.

Mais si les traits de Caroline évoluent, un élément reste commun, sa particularité de fondre toujours les femmes qu’elle dessine dans le décor. Les femmes de Caroline sont faites de blanc, de rose et de beige, comme le fond. Ainsi, elles disparaissent presque dans le décor, composé d’une seule teinte brute. Caroline gomme totalement les ombres ou la perspective. Ce choix cache peut être l’envie symbolique de la jeune artiste de mettre en lumière le fait que les femmes sont encore trop souvent oubliées dans notre société, mises au second plan… À l’image d’un événement comme la Coupe du Monde de football, largement plus médiatisé quand il s’agit des hommes que des femmes, ou des différences de salaires, encore criantes en France.

La palette de couleurs de Caroline est très limitée, ce qui fait aussi le charme et la force de son travail d’illustratrice. Les teintes sont toujours pastel et tendres. Rose pâle, beige foncé, rose saumon, blanc en sont les principales composantes. Grâce à cette palette de couleurs bien définie, le monde de Caroline ne fait qu’un. Les couleurs créent une unité puissante entre ses illustrations, qui n’aurait pas été possible sans elles. Tout s’accorde harmonieusement comme dans une unique série consacrée aux femmes en tout genre. Ce choix de couleurs douces, l’artiste l’explique par sa personnalité très réservée et pudique. De plus, elle aime le côté mélancolique et nostalgique de ces tons. Ces teintes, très justes, illustrent la douceur des femmes et donnent envie au public de les traiter autrement, avec autant de tendresse que Caroline. On ressent alors ce même élan de solidarité féminine et ce même lien puissant entre les femmes que dans les peintures d’Emma Cutrie. Caroline définit justement la féminité comme « une dualité entre fragilité et force », définition parfaite de ses illustrations.

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